samedi 28 mars 2015

Passion crépusculaire.

La rapidité, des assauts dans le cœur. Ce soir, dans l'obscurité d'une ruelle pavé, deux regards se croisent. Ce n'est rien deux regards. C'est même d'une banalité affligeante. Et pourtant, voilà qu'une fois sur mille, quelque chose de fantastique peut en découler. Un regard, puis un autre. Dans Paris pavé, la jeunesse rit à gorge déployée. On fume. Trop, évidemment. Il faut savoir oublier le mal. On fume parce pour le chic, parce que les autres le font. Et parce que ça emmerde Papa Maman. Et puis on se retrouve piégé, obligé de continuer. Alors elle fume. Encore. Une autre cigarette, et une gorgée de vin. Inès a la tête qui tourne. Et le cœur, aussi. Non, ce n'est pas l'alcool. C'est plus que cela. Plus profond. Plus encré. C'est l'attraction. L'attirance des corps dans la ville qui s'endort. Un autre regard, encore. C'est moche d'être accro en deux secondes. C'est frustrant. C'est incompréhensible, même. Le coup de foudre ne s'explique pas. Mais c'est certainement ce qu'il y a de plus horrible à vivre. Le coup de foudre, c'est l'amour qui poignarde, qui vous oblige à y penser sans se l'expliquer. Elle aimerait fuir. Inès voudrait déguerpir. Mais elle ne peut pas. Car il insiste. Il l'observe. Il, n'a pas de prénom. Il ne se résume qu'à une marque de cigarettes et une couleur de pupilles. Et Il, a surtout réussi à piéger Inès, vite. Trop vite. Achevée, distraite, elle se perd. Ses pieds nus foulent le sol, et elle entraîne quelques amis. Fuyons sur les quais. Et elle disparait avec toute la déception que cela engendre.

On danse, on se déhanche, c'est la décadence. Rien ne pourrait interrompre la joie ambiante, et le mojito qui coule à flot. Les boites de nuit sont devenues le rendez-vous des amnésiques volontaires. Le samedi soir, on oublie. Tout. Jusqu'à son propre prénom. Le but est de sentir les effets jusqu'à ne plus rien sentir du tout. Alors Inès s'exécute. Et comme les autres, cherche à se perdre en quelques lieux obscures, la tête déglinguée. Chez Régine, le temps s'est arrêté. La fête semble y durer depuis un siècle. Le vice se lit autant que l'insolence. Les gamines, à 16 ans à peine, jouent avec les sequins de leurs robes toujours trop courtes, le sourire sanguin. Plus rien n'a d'importance. Plus rien n'existe si ce n'est la décadence. La décadence et rien d'autre. On pourrait mourir dans un souffle. Mourir d'ivresse. Mourir d'un trop plein. C'est ce que chercher Inès, en vain. Elle n'y parvient pas. Elle n'y parvient plus. Elle le voit, tout le temps partout. Alors qu'il n'est nul part. Elle le cherche, en vain. Et l'imagine, lui brisant le coeur en permanence, penché sur les lèvres d'une énième connasse qui l'aspire un peu plus dans ses filets.

C'est moche, clairement, cette jalousie ambiante. Ce besoin d'être reconnu par un inconnu qui n'a probablement aucun souvenir de cette folle nuit, où il aurait pu se dire oui. C'est moche d'attendre dans le vide, et c'est encore plus vulgaire de se pouponner pour le néant.


Morgane. ©












mardi 17 mars 2015

Happy New Year, c'est préhistorique.

Il est de bon ton, chaque St Sylvestre, de célébrer ce que l'on appelle la nouvelle année. Comme si l'y avait une finalité à toutes les difficultés rencontrées durant l'année. A croire que la pensée collective cherche à faire table rase de ce qu'il a bien pu se passer auparavant. Mais les choses ne sont pas aussi simples qu'elles pourraient en avoir l'air. La fin de l'année ne marque pas un début mais une boucle. Ce n'est qu'un éternel recommencement que l'on vous vend comme la fin d'une galère astronomique, comme la perspective de jours meilleurs.

Rien n'a jamais été plus absurde. Le changement d'année n'empêchera jamais votre boss de battre des records de mauvaise humeur au bureau. Le changement d'année n'empêchera pas votre voisine, un peu coquine, de vous infliger de son vice, les échos des relations sexuelles que vous n'avez plus depuis que monsieur est parti avec Miss plan-plan dont la profondeur de son décolleté n'a d'égale que la stupidité de ces propos. Et Dieu sait qu'il y a du monde au balcon ... 

Non, rien ne changera. Le temps comme nos vies, ne peut se rebooter. Et on doit faire avec. Accepter la défaite et s'en relever en maître. Comprendre que la vie peut être absurde mais composer avec, s'y conformer, l'accepter. Rien ne change. Tout recommence. En permanence. Evidemment, il y aura toujours au fond de votre gorge, ce goût dégueulasse - l'amertume de l'injustice - lorsque vos espoirs, portés par une euphorie nouvelle, celle d'un nouveau départ, se retrouveront évincés par la réalité, plus difficile. Plus solide surtout. La réalité des rêves perdus. De toutes ces choses qu'on a espéré en vain. Dont on a rêvé et qui n'ont jamais dénié arriver. Il faut accepter son sort, comprendre que la destiné est une garce et savoir prendre les coups sans s'écrouler dessous. S'accrocher. Toujours s'accrocher et ne jamais renoncer. Savoir qu'il y a toujours plus malheureux, que certains ont la tête enfoncés dans le caniveau. S'accrocher, se serrer les coudes, saisir une main qu'on vous tend et rendre les sourires qu'on peut vous offrir. Chérir cet être qui vous promet l'infini mais qui surtout, sera prêt à vous porter, à vous offrir un peu d'espoir. 

Changer d'année n'est rien, n'arrangera rien à cette rage que vous subissez ici-bas. Tombez amoureux, plutôt. Vivez la vie au travers des yeux de l'autre. Et souriez. Souriez toujours. On ne sait jamais ; ce peut très bien être la dernière fois.


Morgane.©