lundi 14 septembre 2015

Elucubrations Nocturnes. #1


Alors il se glisse contre moi dans le sofa et du coin de l'oeil, je l'observe doucement. Je suis persuadée qu'il sait que je ne dors pas vraiment, que je fais semblant. Mais il ne dit rien et se couche contre moi, l'air de rien. Le temps semble alors s'être suspendu tandis qu'à mon cou se glisse son souffle chaud. Je ferme les yeux et souris, bercée par l'ataraxie de l'instant. 

On ne parle pas suffisamment du bonheur. Je le soupçonne de ne pas être assez vendeur. Les gens veulent du sang, de la haine et de la peur. Comme pour se rassurer. Ainsi pourront-ils penser que leur existence n'est pas si terrible, qu'il y a pire. Pourtant, il leur suffirait de profiter des petits riens qui font la vie, des bonheur inconscients sur lesquels jamais on ne se penche. 

Je m'épanche un instant - juste un - sur la misère mondiale. Tous ces bonheurs dont on ne sait profiter, tirer bénéfices. Toute cette  allégresse à laquelle on se refuse, de peur qu'elle ne s'échappe. Et j'hésite à savoir s'il faut en rire ou pleurer. L'homme qui est le plus exposé aux délices que peut procurer la vie est, semble t-il, celui qui en tire le moins profit. Serait-il incapable de déceler les bonheurs simples au point de s'en priver complètement ? 

Contre les vitres s'écrase la pluie qui annonce l'arrivée de l'automne. Dans la cheminée brulent comme une amorce au froid, quelques buches. Et je crois m'être endormie. Plus rien ne bouge. Seuls les corps se serrent. Seuls les souffles se mêlent. Ne reste que le bonheur. De ceux qui ne possèdent rien mais qui ont déjà tout. 

                                                                                                                                                                 




jeudi 23 avril 2015

Ce ne sera pas tous les jours la fête.

Tu vois, j'aimerais crier, j'aimerais hurler cette difficulté que j'ai à vivre, cette impression permanente et ce creux au fond de mon estomac que je ne parviens pas à compenser. J'aimerais que tu comprennes que oui, tu peux avoir mal. Mais que moi aussi je souffre de cette maladresse que tu affiches souvent. Que tu remarques cette difficulté que j'ai à m'insérer dans un monde normal. Et ce rejet que je fais parfois. Des autres, comme de moi. J'aimerais que tu saches que parfois, quand je suis toute seule dans le noir, je rêve de choses bizarres, pas très normales. De nos existences qui dérapent. Et j'en ai peur. Vraiment. J'ai peur de ces fantômes qui me hantent. De plus en plus. De ce fil qui se coupe, en permanence. Et de moi qui plonge, dans ce noir profond. 

J'ai peur de tout ça, des autres autant que de moi. D'exister autant que j'ai eu peur de l'aimer. Tellement peur que j'en viens à redouter de respirer, de vivre. Peur de tout ça, du regard des autres, du comment du pourquoi. Sauf de lui, je crois.  

Je pourrais te l'expliquer, utiliser A + B et autres conneries de ce genre. Je pourrais très bien te murmurer ce à quoi je pense parfois, avec honte. Ce petit feu qui me consume, qui m'atteint et me rend malade. De toutes ces choses que je n'ose m'avouer, de mon corps qui lui même, refuse de bouger. Cette peur de l'échec, ou de la déception. Cette peur de tout, tout le temps. De vivre et d'exister. Cette pression, à laquelle je refuse de me soumettre et ma tête, que je parviens de moins en moins à sortir de l'eau.

J'étouffe. Tu entends ? Est-ce que tu entends comme je crie ? Sûrement pas puisque je ne sais plus le faire. Je ne sais plus rien si ce n'est me faire mal. Encore. Me blesser. M'autodétruire, spectatrice de ma propre défaite. Peut être que nous avions tort. Peut être que je ne mérite rien. Peut être qu'il ne reste qu'une seule solution, qu'elle devrait passer sur mon crâne cette roue de camion. Et qu'elle arrangera tout. Définitivement. Définitivement, oui. Pour toujours, et à jamais. 

Morgane.©

















samedi 11 avril 2015

La playlist du week end. #1


Samedi soir. 

Yanis - Hypnotized


The Street - Fit but you know it


Yukek - Off the wall


Flight Facilities feat. Giselle - Crave you


La Femme - Sur la planche 


The Rumors - Chinese Food


The Amplifetes - Somebody new


Blur - Girls and Boys


       


Les pessimistes maladifs.

J'ai le pessimisme facile, les jours dociles. Je parviens, malgré moi, à me convaincre que le bonheur ne dure pas. Que l'allégresse comporte son lot de tristesse. On pourrait appeler cela l'amertume des beaux jours. L'ivresse à double tranchant, la paranoïa des gens heureux. De ceux qui sont incapables de profiter des beaux jours. Car après le beau temps, vient la pluie. Car rien ne dure. Car tout se paie. Je suis de ces gens qui craignent, d'un passé douloureux, et de façon maladive, le bonheur. 

L'affliction permet de ne jamais avoir à tomber. Elle a ce côté rassurant. Plus rien n'est à perdre quand nous sommes déjà six pieds sous terre. Il ne reste qu'à se relever. Alors qu'aux sommets vertigineux d'une ivresse instable, chuter n'est pas si difficile. Se faire pousser serait même trop simple. A quoi bon lutter contre une chute inévitable lorsque l'on peut s'en tenir à la stabilité. Le bonheur modéré est l'assurance de ne jamais finir la gueule cassée. 

Il faut se méfier des gens heureux, ils ont souvent des choses à cacher. Eux aussi ont des cadavres dans leurs placards. Ce n'est pas propres aux incorrigibles mélancoliques qui ne parviennent à se satisfaire pleinement de l'instant pour en oublier la réalité trop présente. Un coup de couteau arrive trop rapidement. Souvent sans avoir à être mérité. Il ne suffit pas d'appeler la poisse pour qu'elle frappe à votre porte et pointe le bout de son nez.


Morgane.©



samedi 28 mars 2015

Passion crépusculaire.

La rapidité, des assauts dans le cœur. Ce soir, dans l'obscurité d'une ruelle pavé, deux regards se croisent. Ce n'est rien deux regards. C'est même d'une banalité affligeante. Et pourtant, voilà qu'une fois sur mille, quelque chose de fantastique peut en découler. Un regard, puis un autre. Dans Paris pavé, la jeunesse rit à gorge déployée. On fume. Trop, évidemment. Il faut savoir oublier le mal. On fume parce pour le chic, parce que les autres le font. Et parce que ça emmerde Papa Maman. Et puis on se retrouve piégé, obligé de continuer. Alors elle fume. Encore. Une autre cigarette, et une gorgée de vin. Inès a la tête qui tourne. Et le cœur, aussi. Non, ce n'est pas l'alcool. C'est plus que cela. Plus profond. Plus encré. C'est l'attraction. L'attirance des corps dans la ville qui s'endort. Un autre regard, encore. C'est moche d'être accro en deux secondes. C'est frustrant. C'est incompréhensible, même. Le coup de foudre ne s'explique pas. Mais c'est certainement ce qu'il y a de plus horrible à vivre. Le coup de foudre, c'est l'amour qui poignarde, qui vous oblige à y penser sans se l'expliquer. Elle aimerait fuir. Inès voudrait déguerpir. Mais elle ne peut pas. Car il insiste. Il l'observe. Il, n'a pas de prénom. Il ne se résume qu'à une marque de cigarettes et une couleur de pupilles. Et Il, a surtout réussi à piéger Inès, vite. Trop vite. Achevée, distraite, elle se perd. Ses pieds nus foulent le sol, et elle entraîne quelques amis. Fuyons sur les quais. Et elle disparait avec toute la déception que cela engendre.

On danse, on se déhanche, c'est la décadence. Rien ne pourrait interrompre la joie ambiante, et le mojito qui coule à flot. Les boites de nuit sont devenues le rendez-vous des amnésiques volontaires. Le samedi soir, on oublie. Tout. Jusqu'à son propre prénom. Le but est de sentir les effets jusqu'à ne plus rien sentir du tout. Alors Inès s'exécute. Et comme les autres, cherche à se perdre en quelques lieux obscures, la tête déglinguée. Chez Régine, le temps s'est arrêté. La fête semble y durer depuis un siècle. Le vice se lit autant que l'insolence. Les gamines, à 16 ans à peine, jouent avec les sequins de leurs robes toujours trop courtes, le sourire sanguin. Plus rien n'a d'importance. Plus rien n'existe si ce n'est la décadence. La décadence et rien d'autre. On pourrait mourir dans un souffle. Mourir d'ivresse. Mourir d'un trop plein. C'est ce que chercher Inès, en vain. Elle n'y parvient pas. Elle n'y parvient plus. Elle le voit, tout le temps partout. Alors qu'il n'est nul part. Elle le cherche, en vain. Et l'imagine, lui brisant le coeur en permanence, penché sur les lèvres d'une énième connasse qui l'aspire un peu plus dans ses filets.

C'est moche, clairement, cette jalousie ambiante. Ce besoin d'être reconnu par un inconnu qui n'a probablement aucun souvenir de cette folle nuit, où il aurait pu se dire oui. C'est moche d'attendre dans le vide, et c'est encore plus vulgaire de se pouponner pour le néant.


Morgane. ©












mardi 17 mars 2015

Happy New Year, c'est préhistorique.

Il est de bon ton, chaque St Sylvestre, de célébrer ce que l'on appelle la nouvelle année. Comme si l'y avait une finalité à toutes les difficultés rencontrées durant l'année. A croire que la pensée collective cherche à faire table rase de ce qu'il a bien pu se passer auparavant. Mais les choses ne sont pas aussi simples qu'elles pourraient en avoir l'air. La fin de l'année ne marque pas un début mais une boucle. Ce n'est qu'un éternel recommencement que l'on vous vend comme la fin d'une galère astronomique, comme la perspective de jours meilleurs.

Rien n'a jamais été plus absurde. Le changement d'année n'empêchera jamais votre boss de battre des records de mauvaise humeur au bureau. Le changement d'année n'empêchera pas votre voisine, un peu coquine, de vous infliger de son vice, les échos des relations sexuelles que vous n'avez plus depuis que monsieur est parti avec Miss plan-plan dont la profondeur de son décolleté n'a d'égale que la stupidité de ces propos. Et Dieu sait qu'il y a du monde au balcon ... 

Non, rien ne changera. Le temps comme nos vies, ne peut se rebooter. Et on doit faire avec. Accepter la défaite et s'en relever en maître. Comprendre que la vie peut être absurde mais composer avec, s'y conformer, l'accepter. Rien ne change. Tout recommence. En permanence. Evidemment, il y aura toujours au fond de votre gorge, ce goût dégueulasse - l'amertume de l'injustice - lorsque vos espoirs, portés par une euphorie nouvelle, celle d'un nouveau départ, se retrouveront évincés par la réalité, plus difficile. Plus solide surtout. La réalité des rêves perdus. De toutes ces choses qu'on a espéré en vain. Dont on a rêvé et qui n'ont jamais dénié arriver. Il faut accepter son sort, comprendre que la destiné est une garce et savoir prendre les coups sans s'écrouler dessous. S'accrocher. Toujours s'accrocher et ne jamais renoncer. Savoir qu'il y a toujours plus malheureux, que certains ont la tête enfoncés dans le caniveau. S'accrocher, se serrer les coudes, saisir une main qu'on vous tend et rendre les sourires qu'on peut vous offrir. Chérir cet être qui vous promet l'infini mais qui surtout, sera prêt à vous porter, à vous offrir un peu d'espoir. 

Changer d'année n'est rien, n'arrangera rien à cette rage que vous subissez ici-bas. Tombez amoureux, plutôt. Vivez la vie au travers des yeux de l'autre. Et souriez. Souriez toujours. On ne sait jamais ; ce peut très bien être la dernière fois.


Morgane.©










vendredi 27 février 2015

Ô Paris.

Paris. C'était il y a une semaine. Et pourtant, j'ai l'impression d'être partie depuis une éternité. D'avoir déserté depuis mille ans, déjà. Alors je me remémore tous ces instants passés sur le pavé. Au XXIème siècle, les photos ont remplacé la mémoire. C'est dommage mais c'est comme ça. Je pense en partager quelques unes avec toi petit lecteur. Ce n'est pas grand chose, mais à part ces maigres lignes et quelques jolies images qui font s'évader, je n'ai pas grand chose d'autre à te donner.

Paris c'était beau. Paris c'était nous. Paris, ce sont les rires quand j'arrive, seule dans la nuit, et surtout sans te prévenir. Quand tu me maudis de ne t'avoir rien dit alors qu'au fond, tu bouillonnes de bonheur. Paris, c'est des nuits qui ne durent pas assez longtemps, des moments qu'on ne veut jamais voir s'arrêter. Paris c'est beau. Paris c'est moche. Paris, c'est tout à la fois. C'est des souvenirs, qui se bousculent. Et qu'on garde égoïstement, parfois. C'est aussi des journées passées à sillonner. Sans savoir pourquoi. Sans but. Pour le plaisir de la chose. Il y a le Paris qui nous fait rêver, le Paris qui nous fait pleurer. Il y a les arrivées et les départs. Evidemment, les derniers sont moins appréciés et jouissent même d'une sale réputation. Séparateur, destucteur, cause de bien des pleurs. Paris, c'est Montparnasse, qu'on adore ou qu'on deteste. Tout dépend du sens du train. Paris, c'est le manque qui me pèse chaque jour un peu plus. Paris que je maudis de t'enlever à moi. Paris que je rêve de conquérir juste pour ton sourire.


Morgane.©
Les photos sont de moi.








lundi 26 janvier 2015

Elucubrations soporifiques de gamines corrosives.


La pluie sale s'écrase contre le double vitrage. Et le soleil n'a pas pointé son nez depuis quelques jours déjà. Je crois qu'il a du prendre un RTT. Ou peut être est-il simplement effaré par la laideur de ce monde. La nature semble s'être arrêtée. Plus rien ne bouge. Plus rien ne vit. Même le vent à cesser de souffler. Ne reste que le silence. Ce silence pesant qui se fait sentir, lorsque la tempête a pris fin, que tout est à terre. Et pourtant, les arbres sont encore debout. Bien qu'ils n'aient plus rien de bien fier, bien qu'ils semblent avoir perdu leur âme d'antan. Le paysage est fade, porte un goût de trop vu, de statique. Plus rien ne change. Plus rien n'évolue. L'hiver dure depuis une éternité. Et ne semble pas vouloir s'effacer pour laisser place à des jours nouveaux.

Et moi j'écris ces paysages fadasses, presque dégueulasses, qui aujourd'hui s'entassent entre mes lignes. Non, il n'y a pas de signification. Je le fais car c'est tout ce qu'il me reste, l'écris. Autrefois, j'avais plus que cela. Autrefois, j'ai connu le syndrome de la page blanche, celui qui montre enfin, que tu es guérie. Car écrire, car ce besoin de se vider - de vomir presque - sur ces quelques lignes des élucubrations sans intérêt est de l'ordre de la thérapie. Et tous les véritables écrivains vous le diront ; les gens qui vont bien n'écrivent pas, ils vivent la vraie vie pendant que nous, nous écrivons pour tenter d'oublier la réalité. J'ai peine à voir que tant d'enfants rêvent de savoir aligner les mots comme des grands noms de la littérature alors que eux ne jouent qu'avec des maux. Écrire est un symptôme. Ça n'a jamais été un gage de bonne santé mentale. Écrire est une sorte de rêve éveillé, prolongé. Écrire pour s'envoler, pour s'émerveiller. L'écrivain n'est pas quelqu'un de bien, ou de sain. Le bonheur n'a jamais été facteur d'inspiration. D'ailleurs, avez-vous déjà vu quelqu'un écrire sur le bonheur ? Et je ne parle pas de ces banales " Happy End " à l'américaine, bâclées et le plus souvent ratées, où le gentil héros américain qui après avoir zigouillé du petit doigt ce vilain terroriste du moyen orient, vient de sa langue nettoyer les amygdales de cette fille qui n'a d'imposant que sa poitrine charcutée.

Je parle d'un bonheur véritable. De A à Z. Je vous parle de ces gens qui sont capables de se réveiller le matin en souriant. Tout simplement. On écrit jamais sur le bonheur. On évite le bonheur. Il n'inspire personne et n'attire personne. Notre héros ne doit pas être heureux tout de suite. Il doit se battre et souffrir, longtemps. Se faire avoir, tomber, s'égratigner. Longtemps. Et pleurer. Surtout pleurer.


Le bonheur n'est pas vendeur. Inutile de s'acharner. Alors on écrit sur le désespoir humain. Et pour cela, il faut déjà être très atteint, et connaître son sujet. Voilà pourquoi les vrais écrivains ne sont pas des gens sains. Ils savent ce que c'est de souffrir, d'avoir mal, d'avoir le cœur pressé en permanence. Il faut être détraqué, ne jamais être pleinement satisfait. Connaître ce vide, permanent. Ne se contenter que de l'impossible. On ne trouve jamais rien sur le bonheur simple car il ne se partage pas. Trop personnel. Alors que la tristesse est universelle. On se fout clairement de ces gens heureux. On serait même prêt à leur offrir notre majeur levé. Et notre haine. Pourquoi auraient-ils droit à l'inaccessible ?


Je crois que je connais le bonheur ces derniers temps. Depuis un peu plus d'un an. Je suis heureuse. Vraiment. Mais je suis parfois vide. Vide de son absence. Lorsque l'on trouve la personne qui vous emplit, vivre sans est difficile. Encore plus qu'avant, lorsque l'on avait pas encore véritablement conscience de ce vide, lorsque l'on avait du mal à supporter l'existence sans se l'expliquer. Je suis vide. Je suis le néant. Je suis creuse. Et j'ai froid. J'ai froid loin de lui. J'ai froid loin de toi. Alors comme tout le monde, je compense l'absence. Je ferme les yeux et je pense à ce bonheur à venir. Pour quelques temps. Avant de me raccrocher de nouveau à mon néant. Je revois son visage, son sourire. Il est plein d'espoirs, son sourire. Il est beau, plein de vie. C'en est insolent. Et je l'aime pour cette insolence. Pour ce visage plein de " je m'en foutisme ". Mais je le déteste de ne pas être là, de m'avoir laissé seule. Seule et creuse. Alors je me venge où je peux. Je déverse ma difficulté sur cette page dont tout le monde se fout, que l'on jugera trop facilement sûrement, d'élucubrations soporifiques de gamines corrosives. Qui ont voulu le bien sans y parvenir. Ce doit être le propre de notre génération ; l'espoir sans le courage. Rêver du bien, l'imaginer, sans agir parce que ça ne sert à rien. Parce que quoi qu'on fasse, on aura mal. On a trop peur de souffrir, on se refuse à une mort lente. On veut finir vite, comme une balle de crâne qui fait tout sauter dans la tête. On ne veut plus se battre. On ne sait plus se battre. Parce que ça ne sert à rien. Parce qu'on a déjà perdu. Parce qu'on est déjà dénigré. À croire que même la vie n'a pas non plus besoin de nous.  





Morgane.© 



lundi 12 janvier 2015

Et après ?

Ce soir, j'écris ces quelques lignes pour tromper les démons de la nuit. Ceux d'une peur trop présente qui n'est que grandissante. J'ai cette volonté de profiter de chaque instant sans y parvenir. J'ai l'impression, parfois de vivre étouffée, de ne plus savoir crier, d'être obligée de suivre les chemins tracés, de rentrer dans les rangs. Je crains de ne m'être perdue dans tout ce que je fuyais. De ne plus rien voir, de me foutre de la misère comme si on l'avait normalisée. La vérité, c'est que j'ai peur. De tout. Et surtout des autres, et de ce qui pourrait arriver. J'ai peur de ne plus pouvoir croire en rien, de ne plus connaitre l'espoir. 

Hier, on a vécu la solidarité. On a vu ces peuples se lever et hurler leur peine, leur colère. Mais après ? Après on fait quoi ? On reprend l'existence là où on l'avait laissé pour que ne reste que les souvenirs ? Qu'on en parle, tous les ans avant d'oublier jusqu'à l'année suivante ? Rien ne sert de manifester s'il n'y a pas de continuité, de leçons qui sont tirées. A quoi bon défendre une cause si rien ne change ? ce n'est pas aujourd'hui qu'il faut se battre, mais tout le temps. On ne doit pas laisser ce cri s'estomper, s'oublier dans la nuit tombante pour repartir à zéro. Ce ne doit être que le début d'une lutte acharnée. Il faut continuer de souffler sur les braises encore chaudes pour que jamais elles ne s'éteignent. Pour qu'elles subsistent. Et nous portent, une fois encore. Dans les rues, le coeur plein d'espoir, la fleur au fusil. Qu'on continue à y croire, à combattre ce mal qui nous entache. Qu'on se lève véritablement. Et pour longtemps. Que ce ne soit pas l'histoire d'un moment.

Nous sommes le lendemain, nous sommes l'après Charlie. Nous sommes ce jour où dehors ne subsistent que les signes d'un espoir qui tente de s'encrer. Nous sommes le jour d'après, celui qui pourrait nous faire céder à l'oubli. Nous sommes ce moment où la vie reprend son court, où l'on se demande " Et après ? " Ce moment où trop facilement, on passe à autre chose, on panse ses blessures, et on avance. On oublie ce poison intense qui pourtant nos menace encore. On s'accroche, on rebouche les fissures en espérant ne plus jamais avoir à s'en préoccuper. Mais soyons lucides, les murs tremblent encore. Le mal n'est pas anéanti. Ne nous voilons pas la face, sans pleurer de nouveau. Alors n'oublions pas, n'oublions jamais cet espoir qui un temps nous a porté, qui un temps nous a fait nous sentir fort et grand. Qui nous a fait croire à un monde sans méchants.


Morgane. ©