lundi 12 janvier 2015

Et après ?

Ce soir, j'écris ces quelques lignes pour tromper les démons de la nuit. Ceux d'une peur trop présente qui n'est que grandissante. J'ai cette volonté de profiter de chaque instant sans y parvenir. J'ai l'impression, parfois de vivre étouffée, de ne plus savoir crier, d'être obligée de suivre les chemins tracés, de rentrer dans les rangs. Je crains de ne m'être perdue dans tout ce que je fuyais. De ne plus rien voir, de me foutre de la misère comme si on l'avait normalisée. La vérité, c'est que j'ai peur. De tout. Et surtout des autres, et de ce qui pourrait arriver. J'ai peur de ne plus pouvoir croire en rien, de ne plus connaitre l'espoir. 

Hier, on a vécu la solidarité. On a vu ces peuples se lever et hurler leur peine, leur colère. Mais après ? Après on fait quoi ? On reprend l'existence là où on l'avait laissé pour que ne reste que les souvenirs ? Qu'on en parle, tous les ans avant d'oublier jusqu'à l'année suivante ? Rien ne sert de manifester s'il n'y a pas de continuité, de leçons qui sont tirées. A quoi bon défendre une cause si rien ne change ? ce n'est pas aujourd'hui qu'il faut se battre, mais tout le temps. On ne doit pas laisser ce cri s'estomper, s'oublier dans la nuit tombante pour repartir à zéro. Ce ne doit être que le début d'une lutte acharnée. Il faut continuer de souffler sur les braises encore chaudes pour que jamais elles ne s'éteignent. Pour qu'elles subsistent. Et nous portent, une fois encore. Dans les rues, le coeur plein d'espoir, la fleur au fusil. Qu'on continue à y croire, à combattre ce mal qui nous entache. Qu'on se lève véritablement. Et pour longtemps. Que ce ne soit pas l'histoire d'un moment.

Nous sommes le lendemain, nous sommes l'après Charlie. Nous sommes ce jour où dehors ne subsistent que les signes d'un espoir qui tente de s'encrer. Nous sommes le jour d'après, celui qui pourrait nous faire céder à l'oubli. Nous sommes ce moment où la vie reprend son court, où l'on se demande " Et après ? " Ce moment où trop facilement, on passe à autre chose, on panse ses blessures, et on avance. On oublie ce poison intense qui pourtant nos menace encore. On s'accroche, on rebouche les fissures en espérant ne plus jamais avoir à s'en préoccuper. Mais soyons lucides, les murs tremblent encore. Le mal n'est pas anéanti. Ne nous voilons pas la face, sans pleurer de nouveau. Alors n'oublions pas, n'oublions jamais cet espoir qui un temps nous a porté, qui un temps nous a fait nous sentir fort et grand. Qui nous a fait croire à un monde sans méchants.


Morgane. ©




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